Au-dehors, il fait froid, l'air est irrespirable, la nature hostile. Comme se serait pratique de ne jamais avoir à sortir affronter le monde et ses mille et un dangers – les intempéries, les prédateurs, la queue à la boulangerie ! Comme se serait bien de n'avoir à donner signe de vie que par micro interposé, le postère posé sur un siège confortable, un chat angora sur les genoux, en riant sardoniquement tout en regardant, sur un mur d'écrans, nos séides agir au quatre coins du monde, en attendant le grand jour ou la Terre tout entière sera enfin sous notre contrôle !
Il faut pourtant, hélas, parfois quitter le doux foyer. La nourriture commence à manquer, l'absence de produits de toilette se fait sérieusement sentir. Il faut partir. Se préparer d'abord, mettre plusieurs couches de tissus sur son corps, emballer ses pieds dans des protections rigides, coiffer sa tignasse, car dehors les règles sont stricts : la police du qu'en-dira-t-on veille.
Alors on sort. On prend une dernière bouffée d'air domestique et l'on se lance, en priant la déesse mère de ne rencontrer aucune encombre. On croise des congénères ; parfois on leur parle. Et puis, petit à petit, on oublie son infortune ; c'est ça être un animal social.
Et là, tout d'un coup, l'aventure se rappelle à nous, la belle, la grande, l'indomptée, elle qui au-dehors nous attendait patiemment. D'ailleurs pas plus tard que tout de suite, notre montre-téléphone sonne : c'est un appel urgent des services secrets britanniques. Il faut partir, loin, affronter un génie du mal dans un château perché dans les Carpates. À peine avons nous eu le temps de recevoir le message que déjà trois individus en tenue noire moulante nous attaque par derrière. Mais nous sommes plus rapide qu'eux. Deux s'enfuient ; le troisième, nous tentons de le faire parler en lui tordant le poignet. Il ne dira rien, ce soldat zélé de l'homme mystérieux au chat angora qui ne sort jamais de son repère. Mais l'aventure ne fait que commencer…