Le canard

Le canard est un oiseau palmipède qui absorbe les liquides chauds quand on le plonge dedans. Lorsque les canards sont en grand nombre, on peut aisément remplacer l'adjectif de la phrase précédente par celui de « palmidés », qui, fait étrange, n'existe qu'au pluriel. Cette curiosité de la langue valant son pesant de cacahuètes, mettons les coin-coins de côté un instant pour nous y intéresser.

Des singuliers qui disparaissent, des verbes défectifs, des règles de grammaire bancales : la langue française semble être incomplète. Pourquoi ? Pour en faciliter l'usage ? Parce que les anciens de l'académie n'ont plus toute leur tête ? Que nenni ! Il s'agit en fait de la conséquence d'une perte partielle de la réalité. Rien que ça.

Vous n'êtes pas sans ignorer que notre dimension cohabite avec tout un tas d'autres mondes. Mais si, voyons ! Plaçons-les arbitrairement verticalement dans l'espace. Plus on monte, et plus le fantastique devient réel, plus on descend et plus le matérialisme prend le dessus. Concrètement, les créatures telles que les loups-garous, dragons ou cyclopes existent à l'étage du dessus alors que les lapins et ornithorynques n'existent que dans la littérature de jeunesse de l'étage du dessous. Le principe même de dimensions multiples étant assez extraordinaire, il y a de fortes chances que le monde soit un cul-de-sac, puisque l'idée même y est ridicule.

Dans ce mille-feuille multidimensionnel, la langue française est bien malmenée. Elle y perd des plumes, des bouts de conjugaisons, des singuliers et du sens. C'est du moins la théorie des anciens de l'académie qui, avouons-le, n'ont plus toute leur tête.

Le canard, lui, inconnu en dessous, chimère dans notre univers, est bel est bien réel chez les voisins du dessus, ou il caquette en faisant des claquettes. Rien que pour cela, il mérite tout notre respect.